Jour 4

Harrington Harbour – Tête-à-la-Baleine & Fiona

Depuis le début du voyage, nous étions aux aguets. non pas que l’on avait peur d’être sur un paquebot mais bien à cause de Fiona. Ce cyclone tropical s’est formé dans les caraïbes et a causé des dégâts considérables dans cette région ainsi que sur les provinces de l’Atlantique . L’ouragan a atteint des vents de près de 215 km/h et a fini sa course dans le golfe du Saint-Laurent et le Labrador le 24 septembre 2022 (nous étions le 22 et arrivions à Blanc Sablon le 24).

Comme déjà mentionné, le but premier du Bella-Desgagnés est de ravitailler la Basse-Côte-Nord de vivres. Le cargo qui mène le bal et le temps d’escale est déterminé par le Capitaine qui selon la logistique des chargements et déchargements ou même une météo trop défavorable, peut en tout temps annuler une escale. Alors imaginez-vous que grâce à Fiona, notre itinéraire à été chamboulée. Nous étions sur le qui-vive et parcourons le site windy.com (le même que le capitaine) pour voir la trajectoire de l’ouragan…. En plein dans le mile…. la trajectoire arrivait directement sur nous.

L’itinéraire initial aurait été de passer au matin à Harrington Harbour, en après-midi à Tête-à-la-Baleine, La Tabatière ainsi que Saint-Augustin en soirée mais Fiona en a décidé autrement. Le Capitaine à décidé de naviguer directement à Blanc Sablon arrivant dans la nuit après Harrington Harbour et Tête-à-la-Baleine. Ce qui fait que nous manquons deux destinations ainsi que Blanc Sablon, la destination que nous voulions plus que tout visiter. Hé bin, pas de chance. Nous ne pouvons contrôler la température ni la décision du Capitaine.

Passant le long de la Côte, nous pouvons, à l’horizon, observer le refuge d’oiseaux migrateurs des îles Sainte-Marie, qui se trouve à 23 kilomètres au sud-ouest de Harrington Habour. C’est celui qui présente la plus forte densité d’oiseaux de mer le long de la Côte et fournit une aire de nidification au macareux moine, au petit pingouin et au guillemot marmette. Pour se rendre sur l’île, il faut une permission spéciale.

Harrington Harbour

En fin de matinée, le bateau ralentis et approche sa prochaine destination… Situé qu’à 3km de la côte, l’île Harrington est un endroit unique en son genre. Elle comprends une petite communauté de pêcheurs venant d’un petit village de la Basse-Côte-Nord reconnu comme étant l’un des plus beaux villages du Québec. Ayant connu la célébrité par le film La grande séduction, cet endroit de prédilection comprends un réseau de trottoirs de bois qui s’étend dans tout le village, reliant les habitations, les entreprises et la plupart des attractions.

Le bateau approche, au loin, on peut y apercevoir un petit port protégé par les vents, entouré de petites maisons de couleur pastel solidement bâties entourées de larges trottoirs de bois. Il y a un totale de près de 239 résidentsqui sont, pour la plupart, de descendance terre-neuvienne. Autefois, Harrington était habité pour la première fois dans les années 1871, par des colons français. Mais, le village est fondé officiellement en 1890, avec l’ouverture de son bureau de poste. Harrington Harbour était connu sous le nom « hospital island », étant la première communauté de la Basse-Côte-Nord à avoir un hôpital. Bien que ce sont les colons français qui sont arrivés dans les tout débuts de sa fondation, des Terre-neuviens se sont aussi installer à Harrington pour vivre de la pêche à la morue et de la chasse au phoque. Aujourd’hui, Harrington est connue pour ses magnifiques trottoirs de bois qui relient les habitations et les entreprises. Il n’y a aucune rue, le seul moyen de se déplacer sur l’île est via ses trottoirs. La majorité des habitants sont anglophone. Certains résidents parlent français et quelques sites archéologiques confirment que l’archipel d’Harrington a été fréquenté par des autochtones et des populations pré-Inuit de culture Groswater.

Nombreuses sont les histoires racontées… En 1542, Marguerite de la Roque, est abandonnée à Harrington Harbour pour avoir entretenu une relation intime défendue avec un membre d’équipage voyageant sur un navire en provenance de France, pour se rendre dans une colonie du Québec. Lors de la traversée, elle serait tombée amoureuse d’un membre d’équipage. L’amant de Marguerite, de même qu’une dame de compagnie, auraient été laissés avec elle sur l’Île d’Harrington, où, selon les recherches, elle donna naissance à un enfant qu’on croit être le premier Canadien-français né ici. Selon la légende locale, elle aurait pris refuge dans la « Grotte de Marguerite », un abri rocheux précaire. Se nourrissant seulement grâce aux rares plantes et animaux trouvés sur l’île, elle fut la seule survivante. Une visite guidée de la grotte peut être arrangée à travers le Centre d’Interprétation de la Maison Rowsell. Le Centre d’interprétation de la maison Rowsell (CIMR) existe depuis plus de 100 ans et est ouvert entre Mai et Septembre. Des tours guidés de la maison Rowsell sont offerts en anglais. Le guide donne des informations à propos des artefacts locaux et de leur importance dans le patrimoine culturel. Les expositions s’adressent à un public de tous âges. On peut d’ailleurs observer le monument Jacques Cartier, commémorant le passage du fameux explorateur français dans la région en 1535.

Le village est blotti sur le côté d’une petite île rocheuse donnant sur la mer. On n’y trouve ni route ni voiture, que des piétons, des bicyclettes et des véhicules tout terrain (VTT). C’était vraiment impressionnant de voir le nombre de VTT roulant sur les ponts de bois, faisant des aller-retours aux maisons et au port cherchant les provisions que le Bella amène. Le réseau de trottoirs de bois tire ses origines d’un programme mis en place dans les années 1960 qu’on appelait autrefois « programme d’emploi d’hiver ». C’est non seulement à cette époque qu’on construit les trottoirs de bois, mais cette décénnie marque aussi l’arrivée de l’électricité, du téléphone et de la motoneige !

Harrington Harbour connaît une grande popularité auprès des visiteurs québécois et étrangers depuis la sortie du film québécois La Grande Séduction, en 2003. La comédie réalisée par François Pouliot met en effet en scène un petit village isolé, rebaptisé Sainte-Marie-La-Mauderne, où vivent d’anciens pêcheurs devenus chômeurs. Son maire Germain et ses habitants tentent d’attirer un médecin au village pour qu’une usine vienne s’implanter. Ils s’appliquent à transformer l’île en petit paradis pour qu’un jeune médecin, forcé de passer un mois à Sainte-Marie-La-Mauderne, décide de rester. Le film met en vedette une galerie de personnages tous plus colorés les uns que les autres, révèle aussi des longs trottoirs de bois pittoresques qui cachent de nombreux secrets. Le populaire film québécois a été tourné à Harrington. Toutes les scènes extérieures et quelques scènes intérieures ont été tournées sur au village. La majorité de la population du village a participé au film, que ce soit comme figurant, ou avec l’équipe de tournage.

Après avoir parcourus tout le village par ses trottoirs de bois, nous sommes revenus à temps sur le Bella pour poursuivre notre itinéraire. La prochaine destination, et la dernière de la journée, s’est avérée mon coup de cœur du voyage. Navigant entre les rigolets, il était impossible de rester à l’intérieur du bateau. Le plus beau du voyage commence. La vue… OMG !! C’était vraiment impressionnant… comment le Capitaine fait pour naviguez entre ses îles?

Tête-à-la-Baleine

Étant l’une des trois communautés francophones de la Basse-Côte-Nord et connue sous l’appellation de Whale Head par ses rares résidants anglophones, Tête-à-la-Baleine tire son nom d’un rocher proéminent ressemblant à une tête de baleine sur une des îles de l’archipel, « Toutes Îles ». Au cours du XIXe siècle, les familles séjournent toute l’année sur les îles environnantes. En 1895, une chapelle est construite sur l’île du centre, l’île Providence. Au fil du temps, les insulaires commencent à passer l’hiver sur le continent afin de se rapprocher du bois et du gibier. Mais encore aujourd’hui, certains résidants continuent de passer leurs étés dans les îles. Le village compte environs 145 habitants. L’hiver, il est possible de se rendre à Tête-à-la-Baleine en motoneige par la Route blanche et découvrir toute les particularités d’un mode de vie nordique.

Au port, nous avons marché en direction d’un petit autobus Jaune pour faire une petite excursion dans le village. Il faut savoir qu’il est possible de réserver des excursions pour chaque destinations avec Voyage Coste. La Coste est L’agence coopérative de solidarité en tourisme équitable et a vu le jour en 2009. Elle organise et commercialise le touriste en Basse-Côte-Nord tout en mettant en valeur l’environnement naturel. Les expériences offertes aux voyageurs sont mémorables et contribue au développement économique de la région. Il est possible de réserver en ligne sur leur site, ou via téléphone; le tout doit être réservé avant le départ du Bella, il n’y a aucune réservation à bord du navire. Le prix des excursions ne sont pas comprises avec ceux du Bella Desgagnés.

Étant donné  que le village de Tête-à-la-Baleine est à 9,1 km du port. Il est impossible de s’y rendre à pied. Voulant à tout prix voir le village et en apprendre d’avantage, nous avons réservé l’excursion Tête-à-la-Baleine en minibus. Sur le site, on mentionne l’escale tous les jeudi vers midi moyennant un tarif de 55 $ par personne. Les excursions sont disponibles entre mai et octobre. Il faut noter que les heures peuvent varier selon l’arrivée du bateau cargo. La durée de la visite est d’environs 2hrs et le bus arrive avant le départ du Bella Desgagnés.

Nous marchions au port en direction du Bus Jaune, on s’installe à l’intérieur et le bus démarre. Gros bruit assourdissant, on entends presque rien. Le chauffeur se retourne vers nous les touristes et se présente.  »Salut gang, Martin Marcoux, chu vot’e guid et j’vais vous faire découvrir n’ot ti coin de pays ». Cet homme, il est vraiment cool. Accent d’un mix acadien, anglo, franco et cayen; c’est vraiment intéressant de l’écouter parler de son village natal. Nous avons parcourus les 9km de route de gravier, rencontrant des signaleurs routiers travaillant sur la … route. Une fois dans l’une des trois communautés francophones de la Basse-Côte-Nord, notre guide nous amène en tout premier lieu à l’école. Autrefois, cet endroit a déjà accueilli une centaine d’élèves. M. Marcoux nous informe qu’il n’en reste aujourd’hui que 3 (primaire et secondaire). Mais bonne nouvelle ! On nous informe que le Bella Desgagnés amène; la semaine suivant notre excursion, une nouvelle famille Ukrainienne venant s’installer dans le village, ajoutant trois élèves Ukrainiens de plus. Que de bonnes nouvelles pour un petit « village gaulois » dont les résidents parlent français et ce dans une région anglophone. N’ayant peu de relève francophone, l’immigration est en quelque sorte un moyen de préserver son avenir.

Deuxième arrêt, l’héliport. Nous avons appris que depuis 2019, les services de transport aérien pour l’ensemble des déplacements des usagers, du personnel et des marchandises pour les CISSS de la Côte-Nord seront assurés par les compagnies Skyjet/Air
Liaison et Héli-Express. Les employés, ainsi que les résidents devant recevoir des soins de santé qui ne sont pas disponibles au village se verront transporté via hélico.

Autrefois, les pêcheurs de la région s’établissaient d’abord sur les îles. C’est au début du XXe siècle qu’ils ont commencé à s’installer sur la terre ferme. Chaque printemps les familles migraient vers l’une des nombreuses îles face au village pour se rapprocher de la pêche. On appelle ce passage la « transhumance », celle du village d’hiver vers celui d’été. En 1895, les résidents construisent l’église Sainte-Anne sur l’île Providence.

Mais aujourd’hui on peut se rendre sur l’île pour voir le Centre d’Interprétation de l’Île Providence qui raconte l’histoire de  l’archipel. Les visiteurs peuvent voir les vestiges d’une fonderie, où l’on transformait en huile la graisse de loup marin; ainsi que des résidences traditionnelles de pêcheurs. Le vieux presbytère a été transformé en un gîte du passant où l’on prépare de la cuisine française typique de la région.

Tête-à-la-Baleine est un paradis pour les amateurs de plein air. Les Îles avoisinantes offrent des possibilités d’observer les oiseaux de mer, les loups marins et les baleines. On peut se promener en kayak de mer ou en VTT, pêcher le saumon et faire du camping sauvage. Notez bien ce nom : Martin Marcoux. Cet homme organise des excursions et peut vous organiser des expéditions dans la région. D’ailleurs, au moment ou nous l’avons rencontré, il cherchait un employé pour son restaurant. Avis à ceux et celles qui désirent vivre une expérience unique ! Il est aussi difficile d’être indifférente face à leur situation de manque d’employé, des jeunes qui quittent pour poursuivre leurs études, du vieillissement de la population, etc.

En hiver, on peut y pratiquer de la motoneige, de la pêche sur glace, de la raquette, du ski de fond. Autrefois, les carnavals d’hiver et les tournois de hockey étaient les évènements de l’année. Nombreuses sont les équipes formées par les gens des communautés : Kegaska – La Romaine – Unamen Shipu – Chevery – Mutton Bay – La Tabatière – Gros-Mécatina – Pakua shipu – Saint-Augustin – Vieux-Fort – Middle Bay – Brador – Lourdes-de-Blanc-Sablon – Blanc-Sablon ; tous se déplaçant en motoneige et se rendant dans les villages pour jouer au Hockey, du bon vieux Hockey entre chums! Les communautés étaient proches et célébraient en gros ! Maintenant, il n’y a plus.. M. Marcoux garde en mémoire ses beaux moments et nous raconte avec fierté comment sa communauté étaient prospère des années auparavant.

La visite se poursuis encore dans ce petit village enchanteur et je tombe tranquillement en amour. Mais quel bel endroit ! On revient sur le chemin de terre et faisons un arrêt avec une vue magnifique des environs. On a une vue imprenable de baies, de flore alpine, ou nous pouvons cueillir des feuilles de thé du Labrador.

Après ces quelques minutes à contempler l’horizon, nous sommes revenus au Bella dans notre autobus bruyant. J’avais une petite boule au cœur en rentrant sur le Cargo. Le regard au loin, je vois partir cet endroit magnifique. Reprenant le chemin, nous naviguons en direction d’une toute autre destination, changée grâce à Fiona. Normalement, les deux prochaines destinations aurait été La Tabatière et Saint-Augustin mais la température ne s’annonçait aucunement favorable pour nous. La tempête approchait et le bateau devait trouver un moyen pour se cacher rapidement pour éviter des problématiques. Donc, pour devancer la tempête, le Capitaine a décidé de se rendre directement à Blanc-Sablon. C’est avec un peu de déception que nous n’avions pu visiter La Tabatière et Saint-Augustin …

Jour 5 – Blanc-Sablon, Saint-Augustin & La Tabatière

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